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Plaidoyer pour l'empowerment des personnes en situation de handicap psychique

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Pourquoi il faut placer la co-construction au cœur de l’élaboration des politiques d’accompagnement.

La santé et l’éducation font souvent débat au sein de la société française, particulièrement ces derniers temps. La pandémie a mis en lumière le manque cruel de moyen de nos institutions publiques, qui ont pourtant été construites sur de grands idéaux. 

Parallèlement, l’anxiété touche toutes les couches de la population de manière croissante:

Si on considère la population générale âgée de 18 à 65 ans sur une année, 15 % des individus présenteront un trouble anxieux au cours de cette année (prévalence sur un an).

Tandis que 21% des 18-65 ans présenteront un trouble anxieux à un moment ou un autre de leur vie (prévalence vie entière).

 Et pourtant, il est un sujet dont on ne débat que très peu dans la sphère publique (et privée d’ailleurs) qui est commun à tous ces sujets : la santé mentale.

Exemple : on commence tout juste à entendre parler d’un enseignement lié au bien-être psychologique à l’école ; les types de soin disponibles sont rares et méconnus ; et enfin, il est souvent perçu comme honteux d’admettre les conséquences graves que peuvent avoir sur nous l’angoisse et le stress. 

Pourtant, ces deux symptômes sont souvent la face visible de l’iceberg. Après tout, on nous a appris à être fort-es et à enfouir le reste en niant complètement son existence. Mais comment identifier ce qu’on ne connaît pas ?

Dans ce contexte, nous sommes convaincus que l’accompagnement des personnes atteintes de maladie mentale peut et doit constamment s’inscrire dans une démarche d’amélioration. Qu’il s’agisse de pathologie mineure ou de véritable handicap, un des écueils du soin tel qu’il est actuellement pratiqué en France réside souvent dans son caractère rigide, opaque (“nous savons comment vous soigner, faites ce qu’on vous dit”).

Dans la majorité des structures, les procédures sont régulièrement imposées aux personnes suivies. Ell-eux se sentent alors désarmé-es et passi-ves, ce qui renforce leur sentiment d’impuissance face aux défis que leur pathologie représente pour ell-eux au quotidien.

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La co-construction : la clef de la personnalisation du soin

Parmi les solutions existantes, nous pensons que les professionnels et les encadrants gagnent à être sensibilisés à la notion d’empowerment, afin de proposer une prise en charge adaptée au mieux à chaque personne. Les outils de cette pratique permettent entre autre de déconstruire les croyances bloquantes (“je ne m’en sortirais jamais”) et reconstruire la confiance en soi (souvent endommagée) des personnes suivies.

En effet, les méthodes de l'empowerment enclenchent un cercle vertueux qui dynamise le pouvoir d’agir des aidants comme des aidés, et permet alors d’envisager un suivi co-construit entre les deux partis.

S’engager soi-même dans son parcours de soin, en passant d’un rôle passif (“qu’est ce qui peut arranger les choses?”) à un rôle actif (“qu’est ce que je peux faire avec mon accompagnant pour aller mieux?”) change radicalement la donne.

Attention aux généralisations ! Il ne s’agit pas de dire que l’usage de l’empowerment doit être fait dans tous les traitements. Chaque cas étant différent, une démarche pro-active n’est pas une solution universelle. Mais pour les personnes sensibles à cette approche, elle peut engendrer des changements durables et salvateurs. Et elle est malheureusement trop rarement proposée aujourd’hui.

Tou-tes concerné-es

En France, une personne sur cinq souffre d’une maladie mentale. Pourtant le tabou autour de ces pathologies est énorme dans notre pays. Si les populations urbaines sont de plus en plus exposées à une normalisation du phénomène de la thérapie, le traitement médicamenteux (quel qu’il soit) reste diabolisé, et les maladies mentales ne représentent toujours que 2% du budget de la recherche bio-médicale, contre 11% aux Etats-Unis par exemple.

Pour ce qui est de la prise en charge, c’est souvent un parcours du combattant, particulièrement pour les plus démunis. Les CMP (centre médico-psychologiques), institutions salvatrices qui permettent une prise en charge accessible à tou-tes, sont méconnus de la population générale. Pourtant, ils sont paradoxalement souvent débordés, avec des temps d’attente allant jusqu’à 18 mois pour obtenir un rendez vous dans certaines régions.

Même une fois que l’encadrement commence, obtenir un diagnostic concret et délivré avec bienveillance et sans catastrophisme est extrêmement rare.

Quant aux méthodes des praticiens, elles sont trop uniformisée, calquées sur les principes anciens de la psychologie freudienne, qui est loin d’être adaptée pour tous les cas.

Heureusement certaines structures ont déjà amorcé ce virage de la personnalisation par la co-construction. Il est peut être temps de suivre leur exemple et de présenter à tou-tes cell-eux qui le souhaitent un encadrement plus proche d’un partenariat, pour que chacun-e retrouve sa voix.

Kai Teo